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Tourisme : à Paris, l’été noir des hôteliers

"Tenir jusqu'aux JO 2024". C'est le mantra que se répètent les hôteliers parisiens mis à mal par l'absence de touristes. La capitale devrait finir l'été autour de -70% de visiteurs.

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Après un printemps placé sous le signe du confinement, la libération de Paris attendra. Certes, la première destination européenne – en temps normal – retrouve un peu d’air sous passe sanitaire avec, en symbole, l’ouverture mi-juillet des grilles de la tour Eiffel. Mais pour les professionnels de l’hôtellerie, cette saison estivale 2021 s’annonce noire. « D’habitude, on accueille 10 millions de touristes l’été. En juin, quand les indicateurs sanitaires étaient au vert, on en espérait 5 millions. Mais en juillet, les réservations se sont écroulées. Je pense que l’on fera 3,5 millions à la fin de l’été », anticipe Jean-François Rial, le nouveau président de l’Office de tourisme de Paris.

En vingt-cinq ans de carrière dans le tourisme, le PDG de Voyageurs du monde n’avait évidemment jamais assisté à pareille dégringolade de la destination Paris. On ne compte plus le nombre d’hôtels parisiens ayant décidé de baisser le rideau. En juin, le taux d’ouverture global n’était ainsi que de 78 %. Et selon le Groupement national des indépendants (GNI), 6 établissements sur 10 ont finalement décidé de ne pas ouvrir en août. Du jamais vu. « Avant le Covid, personne n’aurait imaginé fermer ne serait-ce qu’une journée. Maintenant on a appris à le faire. Et c’est vrai qu’avec les aides, on ne s’est même pas posé la question. C’était fermer ou licencier », reconnaît le patron d’un hôtel parisien de luxe.

Avant le Covid, personne n’aurait imaginé fermer ne serait-ce qu’une journée. Maintenant on a appris à le faire. Et c’est vrai qu’avec les aides, on ne s’est même pas posé la question. C’était fermer ou licencier.

Pour tenir le coup, les multipropriétaires hôteliers n’hésitent d’ailleurs pas à laisser ouvertes toutes les réservations sur les plateformes type Booking, puis à concentrer leurs rares clients sur un seul établissement. « Tous ceux qui ont une clientèle asiatique ou américaine, notamment sur la Rive gauche, ont choisi de fermer. Il ne reste que les établissements près des gares ou les hôtels de chaînes », explique Pascal Mousset, président du GNI Ile-de-France, qui estime que sur le millier d’hôtels que compte la capitale, environ « 20 % sont dans une situation extrêmement délicate sur le plan financier ». Alors les professionnels n’hésitent pas à brader leurs chambres. Du 4-étoiles à 70 euros au lieu de 150 euros la nuit, du Palace à 200 euros contre 800 en temps normal, le marché est totalement déréglé.

Taux de remplissage très faible

Dans le Marais, à deux pas de la place de la République, Andres Muñoz compte ses clients. Avec la baisse de fréquentation, le manager général du 1K Paris, un 4-étoiles branché, a même remplacé l’ordinateur d’un de ses comptoirs d’accueil par une machine à expresso ! « En juillet, on avait un taux de remplissage à 67 % contre 90 % d’habitude. Ce n’est pas si mal, mais on sacrifie nos prix. Sur juin, qui est notre meilleur mois chaque année, on n’a ainsi fait que 40 % du chiffre d’affaires de nos meilleures saisons », détaille le manager.

Du coup, pour cet établissement appartenant à un groupe indépendant, il faut continuer à serrer la vis. « Nous avons eu deux refus pour des PGE, on est un peu les pestiférés de la place bancaire », regrette Kevin Machefert, le jeune directeur général du groupe familial éponyme qui possède, en plus de l’1K, 21 hôtels haut de gamme dans la capitale (1 000 chambres au total pour 40 millions d’euros de chiffre d’affaires et 450 collaborateurs). « On a dû revoir toutes nos structures de charges et nous avons promu la polyvalence à tous les étages. » Des contrats renégociés avec ses fournisseurs, des délais de paiement rallongés et des directeurs qui font la réception quand ils ne s’occupent pas eux-mêmes des chambres. Le groupe est toujours en économie de guerre.

Et s’il réussit désormais à atteindre son point mort à partir de 20-25 % de taux d’occupation, soit 20 points de moins par rapport à la période pré-Covid, c’est aujourd’hui le cash qui manque dans les caisses. « Le marché à Paris c’est 50 % business, 50 % loisir. Sans la clientèle d’affaires, on aura du mal à s’en sortir. Pour tenir, nous allons certainement devoir vendre deux ou trois hôtels cette année. Mais pas question de les brader », prévient Kevin Machefert.

Depuis le printemps, les premières « ventes paniques » ont en effet déjà eu lieu sur un marché très confidentiel détenu par une poignée d’agents spécialisés. « Entre avril et juillet, on a vu des ventes avec des décotes de 20 à 40 %, raconte un professionnel. L’hôtellerie à Paris, c’est une industrie lourde, pas hyperrentable sur l’exploitation et qui reste très dépendante du marché immobilier. » Pour refaire un petit hôtel parisien, il faut compter entre 1 et 2 millions d’euros de travaux. Et tous ceux qui ont acheté en 2016 ou 2017, avec des prêts importants sur le dos, vont se retrouver face au mur de la dette. « C’est pour cela que certains essaient déjà de vendre. La crainte, c’est que l’on perde cette hôtellerie familiale, qui risque de passer dans les mains de fonds étrangers », déplore Pascal Mousset.

La rentrée s’annonce particulièrement saignante dans certains quartiers d’affaires comme La Défense, la Porte Maillot, la Plaine Monceau, mais aussi sur la Rive gauche (Ve, VIe, VIIe arrondissements). (…) Lire la suite sur L’Express

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