Tourisme britannique : une croissance divisée par deux d’ici 2030 ?
L’Europe touristique gronde. De Barcelone à Venise, les manifestations contre le surtourisme se multiplient. Pourtant, de l’autre côté de la Manche, le problème n’est pas l’excès de visiteurs… mais leur absence. Le Royaume-Uni, autrefois fleuron du tourisme mondial, peine à retrouver ses niveaux de fréquentation – et surtout de dépenses – d’avant-Covid.
Selon l’Office for National Statistics (ONS), 39,2 millions de touristes internationaux ont visité le Royaume-Uni en 2024, un chiffre en hausse annuelle, mais toujours inférieur de 4 % au niveau de 2019 (40,9 millions). VisitBritain prévoit 43,4 millions de visiteurs pour 2025, soit +6,2 % par rapport à 2019. Une progression en volume qui masque une faiblesse structurelle : la baisse du revenu moyen par visiteur.
En effet, en valeur nominale, les dépenses touristiques devraient atteindre 33,7 milliards de livres cette année, en hausse de 18,5 % par rapport à 2019. Mais après correction de l’inflation, le constat est bien différent : les dépenses réelles par touriste seront en recul de 7,5 %, soit 2,7 milliards de livres de moins qu’avant la pandémie. En clair, jamais les touristes n’auront aussi peu dépensé – à l’exception de l’année 2020.
💷 Pourquoi une reprise si timide ?
La conjoncture mondiale en est en partie responsable : faible croissance dans les pays émetteurs (hormis les États-Unis), incertitudes commerciales, tensions géopolitiques… Autant de facteurs qui pèsent sur la confiance des consommateurs en Europe, en Chine ou en Amérique du Nord.
Mais les causes internes pèsent davantage. Les prix au Royaume-Uni ont augmenté de 26,6 % depuis 2019 – plus qu’ailleurs – tandis que la livre sterling s’est renforcée, réduisant le pouvoir d’achat des visiteurs. À cela s’ajoute la suppression du shopping détaxé, un coup dur pour le tourisme haut de gamme, qui privilégie désormais Paris ou Milan.
Les nouvelles exigences administratives (ETA pour les Européens, hausse de la taxe aérienne) alourdissent les coûts et compliquent les voyages. Et dans un contexte budgétaire contraint, VisitBritain subira une coupe de 40 % de ses financements en 2025-2026, limitant drastiquement ses efforts de promotion à l’international.
🎯 Objectif 2030 : un cap ambitieux… mais insuffisant ?
Le gouvernement vise les 50 millions de visiteurs annuels d’ici 2030. Même en atteignant cet objectif, les dépenses touristiques réelles ne progresseraient que de 6,5 % par rapport à 2019 – soit deux fois moins que la croissance projetée de l’économie britannique.
En revanche, si chaque visiteur dépensait autant qu’en 2019, le gain atteindrait 22,4 %. Le constat est clair : la quantité ne compensera pas la perte de valeur. Pour que le tourisme redevienne un pilier économique stratégique, il faudra non seulement attirer plus de visiteurs… mais surtout leur redonner envie de consommer.
👉 Prochaine publication du Forecasting Eye de Cebr : 18 juillet.