Jusqu’ici, les disparités tarifaires étaient souvent analysées de manière binaire : un OTA sous-tarife ou non, par rapport au site officiel. Or, ce constat ne suffit plus. C’est l’approche que défend l’édition de juin du World Parity Monitor (WPM) publié par 123Compare.me., qui franchit une étape en introduisant une segmentation comportementale des OTAs et autres plateformes de distribution.
S’appuyant sur les données de tarification collectées sur Google Hotels pour plus de 6 000 établissements dans 60 destinations, l’analyse se base sur quatre indicateurs clés :
- % Lowest : fréquence à laquelle un intermédiaire propose le prix le plus bas.
- Unique Lowest : fréquence à laquelle ce prix le plus bas est proposé uniquement par un canal.
- Lose Cases : nombre total de cas où le tarif OTA est inférieur au tarif direct.
- Nombre moyen d’OTAs au tarif le plus bas : indicateur de la dynamique de guerre tarifaire ou d’actions isolées.
Trois profils comportementaux identifiés : Disruptifs, Réactifs, Passifs
L’analyse fait émerger trois profils distincts d’intermédiaires :
🔴 Disruptifs : des acteurs à haut risque
Ce groupe regroupe les plateformes les plus agressives, souvent difficiles à contrôler. Leur comportement se caractérise par :
- un grand nombre de Lose Cases,
- des taux de %Lowest très élevés,
- une forte proportion de Unique Lowest, signe qu’ils agissent souvent seuls.
Ces OTAs incluent :
- les grandes plateformes (Booking.com, Agoda, Priceline, Expedia),
- des revendeurs affiliés comme Traveluro ou Super.com,
- ou encore des OTAs exploitant des stocks tiers via des bedbanks.
Action recommandée : exclusion, renégociation contractuelle, traçabilité renforcée.
🟠 Réactifs : suiveurs d’une dynamique concurrentielle
Ils contribuent aux disparités, mais rarement de manière isolée. Leur comportement reflète un environnement de forte concurrence plutôt qu’une volonté de casser les prix :
- taux élevé de Lose Cases, mais peu de cas uniques,
- présence typique dans des situations de guerre des prix (plusieurs OTAs alignés au même tarif bas).
Parmi eux : Bluepillow, Destinia, Zenhotels, Amimir ou encore Trivago côté métamoteurs.
Action recommandée : veille continue, analyse contextuelle.
🟢 Passifs : faible impact, risques limités
Ce dernier groupe affiche un comportement tarifaire stable, avec peu ou pas de disparités notables. Ils n’agissent quasiment jamais seuls et leur part de marché reste faible.
- %Lowest souvent inférieur à 5 %,
- nombre très réduit de cas uniques.
Exemples typiques : Logitravel, Atrápalo, eDreams, Lastminute, ainsi que les métamoteurs Kayak et Skyscanner.
Action recommandée : surveillance passive, sans action prioritaire.
Quand la visibilité ne reflète pas le risque
Selon Jordi Serra, CEO de 123Compare.me :
« Ce n’est pas la visibilité d’un OTA qui compte, mais sa capacité à déclencher seul une disparité. Un canal très visible peut être inoffensif, tandis qu’un autre plus discret peut être à l’origine d’un grand nombre de ventes à bas prix non autorisées. »
L’enjeu ? Passer d’une logique de visibilité à une logique de traçabilité. Il s’agit d’identifier qui déclenche vraiment les baisses de prix, et non pas simplement de surveiller les plus visibles.
L’avis d’expert : un levier pour repenser la distribution
Roberto Gobo, Directeur de la stratégie digitale et technologique chez Valamar, salue cette approche :
« Ce modèle apporte une clarté nouvelle. Il permet d’identifier où il faut vraiment agir, en particulier face aux intermédiaires disruptifs. »
Il encourage les hôteliers à reprendre le contrôle sur le paiement des réservations, même OTA :
- via l’intégration de passerelles de paiement directes,
- une automatisation des flux de réservation,
- et la centralisation des encaissements pour détecter les écarts tarifaires en temps réel.
« Le paiement doit être centralisé par l’hôtelier, y compris pour les réservations OTA. Cela permet de valider le prix réellement vendu et de réagir immédiatement. »
Une approche collaborative à développer
Enfin, Roberto Gobo recommande aux hôteliers indépendants de se regrouper en clusters technologiques et commerciaux, pour mutualiser les investissements (site, moteur, CRM, campagnes digitales) et accroître leur pouvoir de négociation.


 

