« Faudra pas s’étonner si je reçois un pavé dans la vitrine »
Le texte de l’arrêté ministériel pris ce week-end est clair : « Les établissements suivants peuvent rester ouverts : tous les types d’hébergement, en ce compris leur restaurant, mais à l’exclusion de leurs autres débits de boissons, et ce uniquement pour les clients qui y séjournent… » Comme tous les hôtels, celui de Charles Racot à La Roche peut donc continuer à servir des repas, mais uniquement aux clients qui ont loué une chambre et en respectant les mesures imposées jusqu’ici à l’Horeca, soit la distance entre les tables, le plexiglas, le masque pour le personnel, le relevé des noms des clients, etc. A priori une bonne nouvelle pour un hôtelier, surtout à la veille de plusieurs périodes de congés, dont celui de la Toussaint dans moins de deux semaines. Et pourtant, notre Ardennais fait la moue : « je devrais me réjouir mais la mesure me laisse perplexe. Quelle est la différence entre un restaurant classique et celui d’un hôtel ? J’ai 16 lits et je pourrai donc accueillir mes 16 clients à table, c’est très bien pour eux et aussi pour moi mais honnêtement mes clients viennent de partout et ils ont autant de risques d’être porteurs du virus et de le partager que les clients d’un autre restaurant. Et puis que va penser mon voisin qui est simple restaurateur et dont la salle doit rester vide alors que la mienne peut être pleine ? Je vais finir par recevoir un pavé dans ma vitrine, moi… »
Charles Racot n’a d’ailleurs pas très confiance dans la durée de la mesure : « ça ne va pas tenir. Ça va créer une discrimination et peut-être mener à des tensions dans l’Horeca, ça va sûrement sauter. Ça risque aussi de donner lieu à des abus, des gens vont réserver une chambre pour avoir accès au restaurant, mais une fois qu’ils auront mangé, ils trouveront un prétexte pour annuler la nuit. D’ailleurs, je ne mise pas beaucoup sur le congé de Toussaint, pour le moment j’ai davantage d’annulations que de nouvelles réservations. »
« Nos clients peuvent même manger chez nous des plats achetés ailleurs »
A l’Hôtel Donny à La Panne, on se pose moins de questions. Daisy répond avec assurance au téléphone : « le restaurant est ouvert durant toute la semaine et nous servons à nos clients les petits-déjeuners et les repas de midi et du soir, du moins s’ils le désirent. Nous changeons régulièrement la carte, surtout le soir, mais si les clients sont un peu lassés de notre cuisine, nous leur permettons de commander des plats à emporter dans des restaurants locaux et de venir les déguster chez nous. C’est une manière de soutenir nos collègues restaurateurs qui doivent rester fermés. Pas mal d’entre eux ont décidé de proposer des plats à emporter pour les vacanciers qui louent des appartements. Eh bien, nos clients pourront aussi en profiter. Mais attention, il faut dormir pour manger ! C’est la règle édictée par le gouvernement. Moi, j’aimerais évidemment accueillir tout le monde mais je ne peux pas. C’est comme notre sauna et notre centre Wellness, ils sont ouverts mais uniquement pour la clientèle qui loge, pas question d’y inviter des amis de passage. Par contre, notre bar est fermé pour tout le monde, c’est partout pareil. Si on veut boire, il faut manger ! » Et quand on lui demande comment s’annonce le congé de Toussaint, on sent la confiance dans sa voix : « les réservations vont bon train, c’est assez bien rempli au début du congé, un peu moins vers la fin, mais ça peut venir. D’ailleurs, le prolongement des vacances jusqu’au 11 novembre du côté francophone pourrait m’amener de nouveaux clients. Ils feront même une bonne affaire puisqu’à partir du 9 novembre, c’est le début de la basse saison et donc les prix baissent. »
Les chambres d’hôtes ? Comme les hôtels.
A la Fédération des gîtes et chambres d’hôtes de Wallonie, on a accueilli l’arrêté du week-end avec soulagement. « Cela ne change rien pour les gîtes qui sont des locations sans repas mais pour les chambres d’hôtes c’est une bonne nouvelle que les propriétaires puissent continuer à servir des petits déjeuners et même des repas à leurs clients dans la salle commune. Le faire en chambre aurait parfois été compliqué » explique Khevyn Torres, porte-parole de la fédération. « Beaucoup de nos adhérents propriétaires étaient inquiets et nous interrogeaient ces derniers jours, nous avons pu les rassurer par mail, c’est important, car ils craignaient de revivre le cauchemar du confinement du printemps. Les réservations sont prometteuses, le taux d’occupation tourne autour de 70%, tant pour la Toussaint que pour Noël, une interdiction de servir à manger aurait sans doute provoqué des annulations et donc plombé la fin de saison. Cela dit, nous faisons quand même face à des désistements, mais surtout dans les grands gîtes qui sont confrontés à la réduction des contacts sociaux. Comme un foyer ne peut plus recevoir que 4 personnes extérieures, difficile de remplir un gîte de 15 ou 20 places. »
Chez Center Park, on mange au bungalow !
Dans les centres de vacances, les règles sont moins nettes. Chez Center Park, par exemple, les locations de bungalows sont ouvertes, mais les restaurants des complexes restent inaccessibles. Pas question pour autant de faire un régime forcé, la réceptionniste nous l’explique « les restaurants ne sont pas fermés complètement, ils fonctionnent, mais uniquement en » take away « , donc les clients peuvent commander et se faire livrer dans leur cottage. Nos piscines restent ouvertes aussi, mais leur accès est limité, on ne peut y aller que 2 ou 3 fois selon qu’on loue une semaine ou un week-end. La durée est aussi limitée à deux heures et il faut s’inscrire auparavant pour éviter que tout le monde aille se baigner en même temps. » Des restrictions qui ne semblent pas décourager les amateurs du genre : 80% des chalets sont réservés pour la Toussaint. C’est moins que les 100% habituels mais par les temps qui courent, c’est plutôt inespéré !