C’est la promesse inédite d’un voyage dans le temps. Sur un territoire de 30.000 km2 au coeur d’un royaume et d’un héritage jusque-là inconnus du grand public, AlUla s’annonce sans doute comme le désert le plus fantasmé de ces dix prochaines années. Et pour cause. Ce paisible sanctuaire bédouin, dans la région du Hijaz, est devenu un vaste chantier de fouilles archéologiques unique au monde.
A l’inverse des déserts dunaires et parfois monotones de l’Afrique centrale, celui d’AlUla, à près de 200 km de la mer Rouge, illustre de façon spectaculaire la géographie de canyons qui caractérise cette partie de la péninsule arabique. D’emblée, notre échelle de paysage se trouve balayée par les formations rocheuses monumentales semblant surgir du sable. Ces sculptures à l’esthétique taillée par les vents alternent en quelques kilomètres seulement avec les visions de surfaces lunaires, de far west rougeoyant et de plateaux de basalte gigantesques.
Un nouveau destin
Parmi ces oeuvres « naturelles », Elephant Rock, un monolithe de grès de plus de 50 mètres de haut auquel l’érosion a donné la silhouette d’un pachyderme, semble veiller sur le désert. Dans cette immensité minérale, de vastes palmeraies dessinent une oasis dont la luxuriance et la fraîcheur expliquent que, de tout temps, les civilisations aient fait d’AlUla un point d’échanges stratégique sur l’itinéraire nord-sud, emprunté pour le commerce des épices, de la myrrhe et de l’encens.
Ce terrain de jeu quasi exclusif des archéologues depuis le début des années 2000 est aujourd’hui promis à un nouveau destin. Un avenir scellé par une coopération franco-saoudienne créée en 2018 et baptisée Afalula (Agence française pour le développement d’AlUla), sous le patronage d’Emmanuel Macron et de la Commission royale pour AlUla (RCU). Présidée par Gérard Mestrallet, l’ancien président d’Engie, l’agence – dans le cadre d’Arabie Vision 2030 – a pour mission d’accompagner la transformation de l’image et l’économie du pays et de faire de cette région la nouvelle capitale touristique du royaume.
En déployant un collège d’experts en matière d’archéologie, d’architecture, de culture, d’agriculture, de botanique, d’hôtellerie ou encore de formation, elle mise sur un tourisme haut de gamme et patrimonial. Un tourisme de loisirs et non plus seulement religieux. Une manière, pour le premier exportateur mondial d’or noir, de se préparer à l’après-pétrole. Une manière également de faire évoluer les moeurs et l’image d’un royaume largement contesté pour ses atteintes aux droits humains.
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Ambitions culturelles
Avec la création de neuf musées en perspective, une première salle de concert de 10.000 m2 érigée en plein désert, dont la spectaculaire façade miroir reflète le paysage, et une résidence d’artistes mise en place en début d’année, AlUla se positionne définitivement sur le terrain de la culture. Depuis 2018, le festival Winter at Tantora multiplie d’ailleurs les initiatives artistiques et propose même au public de revivre trois mille ans d’histoire à travers des technologies immersives. Quant à la manifestation d’art contemporain Desert X AlUla, elle met déjà en scène aux quatre coins du territoire des installations monumentales comme pour mieux souligner le contraste entre ce décor naturel et les oeuvres, valorisées ici de façon inédite.
Au-delà des paysages somptueux, de l’intérêt archéologique et patrimonial évident de cette destination en devenir, c’est la sensation unique d’être ici « parmi les premiers » qui saisit pour l’instant le voyageur. Privilégiés, les « pionniers », encore confrontés au manque de guides et d’infrastructures d’hébergement, mais qui y gagnent l’accueil chaleureux des locaux, leur plaisir à assister aux débuts d’un tourisme de loisirs. Le potentiel photogénique de ce désert est en outre immense. Pour preuve, les nombreux événements qui ne cessent d’y être organisés. En janvier dernier, AlUla a ainsi servi de décor à un défilé de Dolce & Gabbana. En début d’année également, le Paris-Dakar ou encore le Saudi Tour, une course cycliste internationale, ont choisi d’offrir ce cadre hors norme à leurs spectateurs. Et cela ne fait que commencer… Article complet sur Les Echos