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Tribune | « Si le client est roi, je ne suis pas sa reine ! »

Dans l'hôtellerie, "N'hésitez pas à vous plier en 4, mais ne marchez jamais à genoux !" et surtout, "Si le client est roi, je ne suis pas sa reine" ces deux aphorismes créations de l'illustre hôtelier qu'est Pierre Ferchaud, homme de Palace s'il en est, sont pleins de sens et de vérité. Et encore plus aujourd'hui.

" Si le client est roi, je ne suis pas sa reine" @ credit https://depositphotos.com/

« Si le client est roi, je ne suis pas sa reine » . Cette phrase quasi proverbiale, inventée par Pierre Ferchaud, hôtelier d’exception, peut se résumer ou trouver son explication (et perdre de son caractère sibyllin) dans le titre d’un article paru dans les colonnes de l’excellent  « The Conversation » : « Comment le client-roi mine la reconnaissance des employés ».

Ce constat trouve encore plus d’écho quant on interroge ceux qui quittent la profession. S’il est communément admis que les conditions de travail et les salaires sont parmi les raisons majeures de la pénurie de main d’oeuvre, il n’en demeure pas mois qu’une des raisons principales de cette « déperdition de main d’oeuvre », pourtant rarement évoquée, est le comportement parfois « limite » de certains clients.

Ainsi, je me souviens de l’entretien publié dans nos colonnes (ndlr, le 17 mars 2022) et intitulé « Aux étoiles, je préfère la Terre ! ». Martin Goic, le jeune homme (diplômé et promis à un avenir « en or ») interrogé alors par La Tribune de l’Hôtellerie, avait mis en avant les relations quasi-avilissantes et vexatoires avec certains clients pour expliquer sa « fuite ».

Pierre Ferchaud, à cet égard, nous rappelle au travers d’un autre aphorisme dont il a le secret, la limite de l’exercice :

« N’hésitez pas à vous plier en 4, mais ne marchez jamais à genoux ! »

 

Dans l’article de The Conversation, le journaliste met en avant cette relation-client délétère et la caractérise en s’appuyant sur 4 critères :

  1. L’invisibilité : le client vous parle mais ne ne vous regarde pas ! Le collaborateur n’existe ni physiquement ni socialement, il est réduit à l’état de « meuble ».
  2. Le déclassement ou l’inégalité des statuts et des droits : le client s’adresse avec mépris, condescendance ou avec des gestes inappropriés (claquement de doigts…) aux collaborateurs
  3. Le décalage émotionnel : le salarié doit faire preuve d’empathie à l’égard du client. Mais ce dernier nie les efforts du salarié. Ainsi, le service « Femmes de chambre » fait un effort particulier (déco, pliage…) pour faire plaisir au client sans que ce dernier ne montre la moindre gratitude…
  4. Ne pas reconnaître l’expertise métier : le fait de nier les compétences aux salariés c’est l’abaisser au rôle unique de « laquais ». Or, être un laquais n’est la vocation de personne !

Pour y remédier, il importe de mettre en scène le travail des collaborateurs, de rappeler au client l’expertise de ces mêmes collaborateurs, de mettre en avant les individus au sein du collectif afin de de rééquilibrer les rapports de pouvoir entre clients et employés.

Dernière chose et non des moindres :le design et l’implantation des espaces de service doit estomper le décalage client-salarié, l’asymétrie. Mettre un service au sous-sol de l’établissement est souvent contraint par des données économiques mais rien n’empêche un éclairage zénithal, de l’espace et un aménagement de qualité ! La considération commence par ces fondamentaux.

 

 

Source « The Conversation »