Lyon Capitale : Les dark kitchen se développent dans nos villes. Existent-ils des précédents dans l’histoire ?
Patrick Rambourg : Rien de nouveau sous le soleil. Certains disent “dark kitchen”, moi je dis “traiteur avec livraison”. Saviez-vous que les traiteurs sous l’Ancien Régime avaient déjà un service de livraison ? C’est loin d’être un phénomène nouveau. Je vais même plus loin : la livraison est plus ancienne que les restaurants, qui ont été inventés, eux, dans les années 1760 à Paris. Il faut se rappeler du métier de cuisinier porte-chapes, appelé ainsi en écho au chapeau de fer qui recouvrait ses plats alors qu’il les livrait. C’est l’ancêtre du traiteur actuel.
Il faut se rappeler du métier de cuisinier porte-chapes, appelé ainsi en écho au chapeau de fer qui recouvrait ses plats alors qu’il les livrait.
Il arrivait fréquemment qu’un cuisinier travaille pour une maison bourgeoise et complète ses revenus en préparant des buffets. Cuisinier était un métier multiple tant en cuisine que dans la rue. Pareillement pour la vente à emporter d’aujourd’hui, qui correspond plus ou moins aux commerçants ayant pignon sur rue autrefois. Cuisiner à la maison n’a pas toujours été possible : la cuisine en tant que lieu a longtemps été l’apanage des riches, et nombre d’habitants des villes n’en avaient pas chez eux.
Cuisiner à la maison n’a pas toujours été possible : la cuisine en tant que lieu a longtemps été l’apanage des riches, et nombre d’habitants des villes n’en avaient pas chez eux.
Les gens mangeaient grâce aux professionnels de bouche qui proposaient une nourriture prête à être consommée et aux vendeurs ambulants qui criaient leur marchandise par les rues : “Potage chaud !”, “Petits pâtés !” Il ne faut pas oublier que la rue fut pendant longtemps le lieu de l’alimentation. Il y avait même des fours ambulants pour faire cuire ou réchauffer les plats. On voit bien à présent que le concept de “dark kitchen” n’est pas une nouveauté. Ce n’est pas une rupture avec la tradition. Pour moi, l’utilisation de l’anglais signale un phénomène de mode. (…) Lire la suite sur Lyon Capitale (réservé aux abonnés)